Page 8 - Think education & recherche
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   De gauche à droite
et de haut en bas : Jean-Richard Cytermann, Ronan Stephan, Isabelle Barth, Valérie Gibert, Dorothée Berthomieu
         Rémunérer des « talents » :
la fin d’un tabou ?
C’est un sujet sensible et mais qui concerne de plus en plus d’établissements, grandes écoles, universités ou organismes de recherche : la différenciation des rémunérations faisait l’objet d’un débat de Think 2019.
Fin août 2018, le P-DG du CNRS déclarait devant les vice-prési- dents recherche des universi- tés : « Dans notre pays, on ne
s’est pas donné les moyens pour atti- rer et garder les stars ». Des propos que Jean-Richard Cytermann, chef de l’Igaenr commente en affirmant que cette assertion « marque un peu la fin d’un tabou, avec l’idée qu’il faut créer un véritable régime indemnitaire pour les enseignants-chercheurs. La dernière tentative de différenciation remontait aux années 1980 ». Ronan Stephan, président du conseil d’orien- tation stratégique de l’Université de Lyon et directeur scientifique de Plas- tic Omnium, voit pourtant dans la star un pôle d’attraction et des qualités d’explorateur. « C’est quelqu’un qui va incarner l’organisation, la rendre attractive, et avec qui on aura envie de travailler. C’est quelqu’un de connu et reconnu, notamment parce qu’il agit comme un scénariste des voies possibles et sait ouvrir de nouvelles voies ».
Pour Isabelle Barth, directrice géné- rale d’Inseec School of Business and Economics, « quand on décide de payer une personne dix fois plus, c’est
un choix d’établissement. Tout l’enjeu consiste en la cohérence entre la stra- tégie de l’établissement et l’allocation des ressources financières. Est-ce qu’on le fait pour les enseignants, afin de créer un effet d’entrainement ? Pour les étudiants, afin de créer de l’expérience ? Pour le grand public avec quelqu’un qui passe à la télé et porte la marque ? »
Se pose aussi la question des outils à disposition. Valérie Gibert, DGS de l’Université de Rouen Normandie, et vice-présidente de l’ADGS, estime qu’ils sont nombreux. « On a les contrats LRU, le système d’intéresse- ment, la tenure track, les fondations partenariales, les primes sur contrat, les ERC, les chaires, etc. Au-delà de la nécessaire simplification de ce pay- sage, il faut libérer les énergies pour les mettre en œuvre. Cela demande aussi un dialogue et une acceptabilité sociale ».
Mais au fond, la France est-elle en mesure d’attirer des talents ? Pour Dorothée Berthomieu, les indicateurs sont dans le rouge. « Si on prend le pourcentage de PIB que la France consacre à la recherche, on voit bien qu’on décroche depuis plusieurs
années. La France est au-dessous de la moyenne des pays de l’OCDE, à la 13e place ». Un sous-investissement qui a des conséquences : « Nos voisins européens proposent des salaires deux fois supérieurs, comme en Alle- magne, voir plus si on va au Royaume- Uni ou en Suisse. Résultat : chez nous, on assiste depuis quelques années à une baisse des candidatures dans la recherche publique », ajoute-t-elle.
Quand on décide de payer une personne dix fois plus, c’est un choix d’établissement
ISABELLE BARTH
directrice générale d’Inseec School of Business and Economics
    think education & recherche 2019 • 8
Débat


















































































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