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La place de l’étudiant, entre consommateur et acteur
On parle volontiers de l’expérience étudiante pour évoquer le recentrage de notre système vers le « client » ou l’ « usager », à savoir le jeune qui suit une formation. Entre exigences académiques et transformation du système, comment les institutions réagissent-elles ?
«Quand j’ai créé la direction de l’expérience étudiante à l’Ed- hec, j’ai décidé d’engager une évaluation de l’établissement
par des questionnaires à destination des étudiants. Depuis trois ans, j’ai étudié l’ensemble des verbatims. Grâce à ça, j’ai compris les frustrations, les attentes et ce sur quoi nous pou- vions travailler ensemble », indique Anne Zuccarelli, directrice du départe- ment expérience étudiante et opéra- tions à l’Edhec Business School.
Ce à quoi Olivier Faron, administrateur du Cnam, ajoute : « L’idée d’associer les étudiants à une démarche de qua- lité implique que l’on devrait attendre un retour de notre public. Je rappelle que l’évaluation des enseignants avait été annoncée par François Bay- rou en 1995. Cette évaluation, a des marges de progression à faire, dans l’enseignement public on a un peu contourné cette façon de faire. En même temps, je crois que beaucoup d’enseignants de ce pays ont un rap-
port avec leurs étudiants qui fait qu’il y a un certain nombre d’échanges très positifs qui permettent la compréhen- sion. De même, la création de vice-présidents étudiants dans les conseils d’administration des univer- sités, c’est une avancée extrême- ment forte. »
Il observe également une évolution de la place de l’étudiant, mais qui lui semble corrélée à l’évolution de la société : « On est tous un peu plus consommateurs ». Néanmoins, il émet des réserves sur le terme « client ». « Il y a effectivement une forme de transaction, mais il s’agit d’un bien extrêmement précieux : les connaissances et les compétences ». Selon lui, la relation n’est pas unique- ment marchande, il s’agit surtout d’une « responsabilité par rapport aux étudiants afin de les accompagner vers leur réussite, ce qui dépasse le simple cadre d’une transaction ». Marc Drillech (Ionis) estime quant à lui qu’il ne s’agit pas simplement d’être
des « dealeurs de connaissances », mais bien de « former des individus, détecter chez eux des capacités, et finalement aller au-delà des connais- sances et des compétences ». Il évoque aussi un « establishment » qui empêche l’innovation : « Comment voulez-vous innover si l’ensemble du système ne fait qu’exiger le respect de la norme ? Dans un monde qui jus- tement n’a jamais autant changé, il y a un besoin de réfléchir à notre capacité à vivre avec le hors-norme », inter- roge-t-il.
Pour d’autres, comme Florence Dufour, directrice de l’Ecole de biologie industrielle, les étudiants ne sont pas que consommateurs, mais égale- ment « producteurs » puisqu’ils contri- buent notamment par le biais de leurs associations.
Dans un monde qui justement n’a jamais autant changé,
il y a un besoin de réfléchir
à notre capacité à vivre
avec le hors-norme
MARC DRILLECH Ionis
11 • think education & recherche 2019
Comment l’École de biologie industrielle a revu son évaluation
• De1992à1999,l’écoleamisaupointsaméthodepourévaluerle corps professoral. L’évaluation est basée sur des questionnaires à destination des étudiants, les résultats sont analysés selon des méthodes d’occurrence sémantique et permettent de dégager des points forts et des points de consolidation.
• En2010,latotalitédupérimètredel’école(recherche,enseigne- ment, formation continue) a reçu une certification ISO pour attester de la qualité. Cette certification a mis en évidence le besoin de disposer d’évaluations sur l’activité administrative. Une enquête annuelle a été mise en place (services pédago- giques, accueil, gardiennage, propreté, animation ou vie associative).
Olivier Faron, Yves Grandmontagne, , Florence Dufour, Anne Zuccarelli, Marc Drillech
Débat