Page 18 - GRAND ENTRETIEN
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 Le très grand entretien
  Quel est l’enjeu aujourd’hui ? C’est d’avoir la garantie que le CNRS – en particulier – mette les moyens là où vous le souhaitez, ou qu’il en mette davantage ? C’est que les chercheurs enseignent plus ?
Bernard Belloc : C’est avant tout un dialogue équitable et le respect des stratégies des deux, et si possible la conver- gence.
Sylvie Retailleau : Paris-Saclay est l’une des grandes uni- versités françaises, et la notion de différenciation au sens positif du terme est importante. En France, aujourd’hui, on ne peut pas traiter les 80 universités de la même
façon. Pour autant, elles ont toutes un rôle important. Une dizaine d’entre elles, qui ont un spectre large – les universités dites « com- prehensive » - doivent avoir un poids politique et stratégique à l’Europe et l’international, et être en mesure d’aller discuter en face à face avec Harvard et le MIT. Les autres doivent avoir les moyens de rester des universités - et non pas des « college » – , notamment pour mailler le terri- toire et apporter à la formation la méthodologie et l’esprit critique de la recherche : une université
de proximité qui choisit sa politique et excelle dans un ou deux domaines de recherche.
Au final, on a donc une dizaine d’acteurs à très large spectre en recherche qui évoluent aux côtés d’acteurs très bons dans des domaines spécialisés. Les organismes doivent composer avec cela.
Si un organisme ne discute pas, pour établir son COP, avec ces huit à dix acteurs majeurs, opéra- teurs d’enseignement et de recherche, en France, c’est qu’il y a un problème au niveau national pour établir une stratégie de la recherche forte et cohérente. Ça ne veut pas dire qu’il faut laisser de côté les autres, mais s’il n’y a pas de dialogue spécifique, il y a un problème.
Il y a donc un avant et un après Alain Fuchs au CNRS ?
Bernard Belloc : Non, ce n’est pas une question de personne, ce sont les institutions qui pro-
voquent ça.
Sylvie Retailleau : En effet, il ne faut pas ramener cela à des personnes, c’est l’histoire. C’est aussi un moment difficile, puisque nous avons tous nos COP et nos propres enjeux. Mais je suis persua- dée que cela va évoluer et s’améliorer du fait d’intentions fortes mises dans le COP [du CNRS].
Pierre-Paul Zalio : Il y a une orientation générale, de laquelle nous sommes parties prenantes, de structuration du paysage de la recherche français en grandes universités puissantes. Ce mouve- ment n’est pas incompatible avec un autre mouvement tendanciel de décentralisation de la recherche – si on regarde les publications, c’est très clair, et pour une raison très simple : les publi- cations suivent de manière linéaire le nombre d’étudiants.
On ne peut pas totalement mener cette politique et avoir en même temps une politique qui affirme que la DGRI rencontre les personnes à la tête des quatre principaux organismes : ce n’est pas possible, à un moment donné ça ne marche pas. Je comprends tout à fait qu’un organisme ne souhaite pas du tout devenir une agence de moyens, mais ce n’est pas le sujet.
La proposition que nous avons faite, qui est toujours en route malgré des hauts et des bas, c’est de construire un dialogue stratégique sur les différents sujets : le quantique, l’IA, les nanotechno- logies, les nouveaux modes de régulation sociale... On doit être en mesure, nous Université Paris-
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