Page 24 - Think Culture 2020
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[MODULE 3]
« Il n’y a pas forcément de contradiction entre nos missions de service public et les droits culturels. La démocratisation fait pleinement partie des droits culturels.
Les droits culturels m’ont amenée à penser les choses dans une logique ascendante, en par- tant des habitants. Et sur un territoire comme La Courneuve, si on ne le fait pas, on est totale- ment dans le faux. Cela n’empêche pas de continuer à donner une place centrale aux artistes dans la relation que l’on va tisser sur le territoire
À La Courneuve, il y a une volonté politique très forte d’aller dans ce que l’on pourrait qualifier de “démarche de droits culturels”, même si elle n’est pas formalisée ainsi par les élus.
Cette démarche, c’est celle d’une “ville monde” dans le cadre de laquelle on rend légitimes les
cultures (pratiques, langues...) et les origines des habitants. Cette démarche est intégrée dans tous les services publics. »
Pauline Simon, directrice du centre culturel Jean Houdremont, Scène conventionnée de La Courneuve
« Au fil de mon parcours en Seine-Saint-Denis, d’abord à Bobigny puis à Montreuil, j’ai théorisé le fait que l’on ne peut pas simplement partir de l’exigence artistique et des grandes œuvres, mais que l’on doit tenir compte des populations auprès desquelles nos projets s’implantent.
Le projet que j’ai produit pour la Scène nationale de Cergy-Pontoise n’aurait pas pu se faire à La Rochelle, à Sète ou ailleurs. Ce sont bien les caractéristiques des habitants du territoire du Val d’Oise qui ont inspiré mon projet.
Les élus m’ont choisie pour opérer un change- ment. Lorsque ma nomination a été validée, le président d’agglomération m’a dit : “Il y a 20 ans, j’ai choisi l’ancien directeur parce que je voulais une Scène nationale prestigieuse pour les cadres. Aujourd’hui, je vous choisis parce que je comprends qu’il faut travailler différemment, qu’il faut travailler pour tout le monde. »
Fériel Bakouri, directrice de Points communs, Nouvelle Scène nationale de Cergy-Pontoise et du Val d’Oise
[MODULE 4]
Fériel Bakouri et Pauline Simon
Des missions ou des droits ?
 Le devenir du service culturel de proximité : quelles adaptations ?
 Didier Fusillier et Pierre Sauvageot
« La nécessité d’une réelle proximité va s’impo- ser de plus en plus. On a absolument besoin d’inventer une forte proximité, complémen- taire du numérique qui a tant à nous offrir.
Je suis impressionné par l’envie des artistes, des compagnies de disposer de leur propre lieu à partir duquel ils pourront rayonner sur le terri- toire. Il y a un enjeu sur la localisation et l’inven- tion de nouveaux outils.
Repenser la notion de proximité va poser la question du pluridisciplinaire. Car il est évident qu’on ne pourra pas installer une médiathèque ou un théâtre tous les 300 mètres. En revanche, en articulant l’humain, la présence des artistes et le numérique, on aura un maillage territorial totalement renouvelé.»
Pierre Sauvageot, directeur de Lieux Publics
«La crise nous oblige à inventer un nouveau rapport entre les artistes et les publics. C’est ce que nous avons fait cet été dans le cadre des Moyens du Bord, en partenariat avec le Centre Pompidou. Nous avons invité 9 artistes, dont un duo, à réaliser une œuvre éphémère dans les espaces de la Grande halle. Ils étaient pré- sents sur des plages horaires de quatre heures (de 14h à 18h ou de 16h à 20h) et les publics, qui ne savaient pas trop ce qu’ils venaient voir, pouvaient rentrer gratuitement et rester le temps qu’ils voulaient pour découvrir ces créa- tions en cours d’élaboration. Les publics pou- vaient voir cinq fois la même scène.
Avec cet événement, nous avons inversé le temps de la représentation. En temps normal, les gens achètent un billet pour un spectacle qui dure une heure ou deux. Mais le fait d’acheter un billet, de venir au théâtre, constitue une véri- table démarche à laquelle il faut avoir été un minimum “formé”. Les contraintes très lourdes auxquelles nous devons faire face aujourd’hui nécessitent de penser des formats plus simples pour un public plus spontané qui ne vient pas régulièrement dans les salles de spectacles. » Didier Fusillier, président de l’Établissement public du parc et de la Grande halle de la Villette
 Thème 2
 










































































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